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Comment améliorer facilement vos dialogues en 9 questions

Illustration dialogues entre personnages

Écrit par Éléonore

28 mars 2020

Vous êtes en pleine relecture et vous sentez que vos dialogues sonnent faux, qu’ils sont trop longs, qu’ils sont plats, qu’ils leur manquent ce je-ne-sais-quoi pour en faire de vraies scènes captivantes.

Il existe sûrement une explication à ces impressions de lecture. Voici 9 questions qui devraient vous permettre de trouver ce qui cloche et donc de les supprimer / corriger / réécrire pour en faire des scènes vivantes, percutantes et qui sonnent juste.

Petit rappel avant de commencer : les dialogues sont des passages qui rendent l’histoire plus vivante et qui relient directement le lecteur et les personnages. Ils sont essentiels à un bon roman, mais ne doivent être ni trop longs ni trop fréquents. Il faut alors trouver une répartition équilibrée entre descriptions et dialogues.

 

1) Votre dialogue sert-il la caractérisation des personnages ou leurs relations, l’avancement de l’intrigue, colore-t-il votre histoire d’une teinte dramatique ou humoristique ?

Le dialogue doit avoir un rôle bien précis dans votre récit, mais pas n’importe lequel.

S’il ne remplit pas l’une des fonctions suivantes, demandez-vous s’il ne devrait pas être supprimé (même si vous avez écrit des répliques que vous trouvez géniales. Rappelez-vous ce que je disais dans l’article sur les 12 étapes pour corriger efficacement un roman : tuez vos darlings sans remords pour le bien de votre histoire.)

* Caractérisation des personnages (j’y reviens plus en détail dans le point n° 4, car c’est une des fonctions principales du dialogue).

Illustrer, renforcer ou mettre un terme à la relation entre les protagonistes : si votre histoire est plus centrée sur les personnages que sur l’intrigue, les dialogues auront certainement ce type de fonctions. Il y sera question de rupture, de confidences, de rapprochement, etc.

* Faire avancer l’intrigue : le dialogue doit permettre au lecteur d’apprendre de nouvelles informations, de vivre une révélation, d’assister à un conflit qui va influencer la suite du récit, de prendre connaissance du plan des protagonistes, etc. Bref, il s’y passe des choses qui font avancer l’action.

* Colorer votre histoire : le dialogue est une parenthèse dans le roman. Il peut venir alléger une ambiance un peu dure, sombre, grâce à l’humour ou, au contraire, mettre un peu de profondeur voire de drame dans une comédie.

 

2) Commence-t-il au bon moment ?

Votre dialogue ne s’ouvre-t-il pas trop tôt ?

Un échange efficace n’est pas trop long, il va à l’essentiel. Pas besoin de transcrire les banalités d’usage :
— Bonjour X !
— Bonjour Y ! Comment vas-tu ?
— Bien, et toi ?
Etc.

Si c’est le cas, faites une ellipse et entrez dans le vif du sujet.

 

3) Est-il le reflet d’une conversation « augmentée » ?

Le dialogue de roman N’EST PAS une discussion de la vraie vie.

Vous pouvez vous en inspirer (et c’est d’ailleurs une très bonne idée), mais pas en faire une transcription exacte.

Chaque mot est utile et même les silences ont du sens.

Vous avez choisi d’écrire un dialogue à cet endroit de l’histoire pour une bonne raison : laquelle ?

Pour moi, ce sont des sortes de miroirs d’une réalité augmentée. Tout doit y être plus intense, sans être trop intense. Le bon dosage est essentiel pour donner l’illusion du réel.

 

4) Chacun des personnages est-il bien caractérisé ?

Chaque protagoniste doit avoir sa voix unique.

C’est-à-dire des marqueurs de son âge, son origine sociale et géographique, son vocabulaire, son ton, son époque, bref son style propre.

Un aristocrate né au dix-neuvième siècle ne doit pas parler comme une septuagénaire bretonne un peu brute de décoffrage.

Même des adolescents qui viennent du même quartier n’ont pas les mêmes tics de langage ou le même ton : l’un peut être ironique et pinçant, l’autre timide, par exemple.

Si votre lecteur peut reconnaître qui parle sans la présence d’incises, c’est gagné !

Attention quand même à ce que la voix de votre personnage ne soit pas caricaturale ou trop difficile à lire. Les tics de langage doivent eux aussi être employés avec parcimonie, car ils peuvent vite devenir lassants.

Bref chaque réplique doit incarner votre personnage.

 

5) Le lecteur ressent-il l’état émotionnel du personnage et connait-il ses intentions ?

Le dialogue doit aussi retranscrire dans les mots et les gestes, l’état émotionnel de votre personnage. Est-il résigné, énervé, heureux ?
Il peut, par exemple, bégayer un peu quand il est ému.

Selon le point de vue que vous avez adopté dans la scène, le lecteur doit savoir quel est le but du personnage : que veut-il ?
Mais aussi : quel est l’enjeu s’il ne parvient pas à ses fins ? Que pense-t-il des réactions des autres interlocuteurs ? Que ressent-il lors de l’échange ?

 

Echange entre 3 personnages

 

6) Le lecteur comprend-il facilement qui parle ou avez-vous mis trop d’incises ?

Si le dialogue est bien écrit et les voix caractérisées avec soin, il n’y aurait quasiment pas besoin d’incises.

En placer avec parcimonie donc.

Et si on doit en mettre, doit-on se contenter de dire /répondre ou bien varier les plaisirs ?

Le débat est ouvert ! Deux écoles s’affrontent à ce sujet.

La première est assez influencée par les auteurs anglo-saxons qui grosso modo conseillent de n’utiliser que dire et répondre.

L’école française quant à elle estime que notre langue offre une multitude de synonymes à ces deux verbes et qu’il serait dommage de ne pas les employer et ainsi varier les tournures.

Je ne trancherai pas à ce sujet, je vous laisse expérimenter.

 

7) Vos personnages sont-ils des visages statiques ?

Les dialogues ne sont pas seulement des paroles.

C’est aussi de la mise en scène : des gestes et du mouvement dans un décor qui n’est pas blanc.

Vos protagonistes bougent, s’affairent pendant une scène. Par exemple, ils peuvent éplucher des pommes de terre à la table de la cuisine, remonter une arme dans un stand de tir, conduire une vieille Mustang, courir dans les bois, etc. Ces informations sont importantes pour donner vie à la scène, la rendre crédible.

Mais en plus, vos personnages réagissent aux paroles avec leur corps consciemment ou inconsciemment d’ailleurs. Une phrase a déplu à votre héros, il va serrer les dents. Une parole l’a ému, ses yeux vont se mouiller de larmes ou bien il va fuir le regard de son interlocuteur pour qu’il ne voie pas sa réaction. Et ces comportements en disent long sur la psychologie de vos personnages.

Mettez-vous à leur place et demandez-vous ce que vous ressentiriez, comment vous réagiriez dans cette situation si vous étiez eux.

Bon à savoir : gestes versus mots
La gestuelle, souvent plus inconsciente, gagne sur les mots lors de l’interprétation globale de l’échange. Souvenez-vous de la fameuse série « Lie to me ».
Par exemple : si je vous dis « oui, bien entendu », mais que je fais « non » de la tête, même légèrement, vous allez interpréter cet ensemble de signes et conclure que je pense « non ».

 

Illustration corriger les dialogues de son histoire

 

8) Vos dialogues sont-ils rythmés et ponctués ?

Les dialogues sont des tranches de vie, ils ne sont donc pas des longs fleuves tranquilles. On pourra donc y trouver des « ! », des onomatopées, des phrases courtes et percutantes.

Ils doivent contenir du conflit.

Soit hors des paroles : il sera ressenti par le lecteur par une tension interne du côté du personnage point de vue, grâce à ses pensées. Ce qui peut entrainer silences, évitement, etc.

Soit dans les paroles : ce qui va imprimer des changements de rythme.
Un de vos personnages peut couper la chique à l’autre, s’emporter, répondre finalement par un silence dédaigneux, puis riposter plus doucement lors de la réplique suivante, etc.

Le rythme sert aussi à retranscrire l’ambiance d’un dialogue et les émotions des protagonistes.

 

9) Avez-vous joué vos dialogues pour de vrai ?

C’est très important pour savoir si vos répliques fonctionnent, si elles sonnent juste, si elles sont faciles à lire.

Pour cela, jouez la scène, en vrai dans votre salon à voix haute. Mettez-vous à la place de chacun de vos protagonistes présents dans le dialogue et déclamez sa réplique.

La diction est difficile, vous ne diriez jamais ça dans la vraie vie, vous n’auriez pas formulé la phrase de manière aussi formelle ?

Changez, réécrivez, jusqu’à ce que ce soit plus naturel.

*********

Grâce à ces 9 questions, vous avez fait, selon moi, le tour des points essentiels pour améliorer vos dialogues.

Je voulais juste ajouter quelques compléments sur les erreurs les plus courantes, l’usage de l’ironie dramatique, les différents procédés existants pour faire de vos dialogues des passages savoureux et pour finir 3 règles essentielles sur la présentation des dialogues.

 

Les erreurs les plus courantes à éviter :

*La redondance
Votre lecteur est immergé dans la scène depuis quelques répliques, il connait la situation et ce que pense chacun des personnages. Votre héros est énervé et répond :
— Il en est hors de question !
Pas besoin de compléter la tirade par «, hurla-t-il ». Le lecteur l’a déjà interprété comme tel. Cela ne rajoutera que de la lourdeur à votre dialogue.

*La répétition du prénom des interlocuteurs
— Henri, tu as bien raison et je suis d’accord avec toi.
— Je te remercie, Paul, je suis heureux que tu sois de mon point de vue.
Etc.
Franchement, qui dit ça dans la vraie vie ?

*Les explications mal venues
— Brett, mais comment allons-nous nous en sortir puisque le monstre est derrière la porte et que c’est la seule issue ?
Les deux personnages savent bien tout ça, pourquoi le dire à haute voix si ce n’est parce que l’auteur veut que le lecteur le sache ?
Ça se voit. Beaucoup. Ne le faites pas.

*Les longs monologues
Dans la vie, les longs monologues (à part des discours) sont rares. Souvent celui qui parle est interrompu.
Ce procédé parait donc très artificiel.

 

Pensez aussi à utiliser :

* l’ironie dramatique. C’est un levier puissant pour mettre le lecteur dans votre poche. Vous lui avez donné une information qu’au moins un des personnages de la scène n’a pas.

* les procédés pour faire de vos dialogues des moments savoureux comme les quiproquos, les dialogues de sourds, l’ironie, les bons mots, les allusions coquines, les clins d’œil au lecteur grâce à des références communes ou des références à des points précis de l’histoire, etc.

 

Pour finir, voici 3 règles à respecter pour la présentation d’un dialogue

Ce sont des normes et elles servent à faciliter la lecture.

*Les tirets cadratin
Ils introduisent les répliques et servent de balises au lecteur qui sait ainsi que l’on change de personnage.

*Les retours à la ligne
Si entre deux répliques, vous ajoutez des informations sur la gestuelle ou le décor, vous devez revenir à la ligne. Là aussi pour que le lecteur comprenne que ce n’est plus du dialogue.

*Les incises
Elles sont introduites par une virgule et le premier mot ne prend pas de majuscule.

Exemple fautif :
-On pourrait le faire, tu sais. Dit Gale d’une voix douce.
-Quoi donc ?
-Quitter le district. Nous enfuir. Vivre dans les bois. Ensemble, on pourrait réussir. Je ne sais pas quoi répondre. L’idée est tellement absurde.

Exemple correct :
— On pourrait le faire, tu sais, dit Gale d’une voix douce.
— Quoi donc ?
— Quitter le district. Nous enfuir. Vivre dans les bois. Ensemble, on pourrait réussir.
Je ne sais pas quoi répondre. L’idée est tellement absurde.

(Hunger Games, Tome 1, Suzanne Collins, traduit par Guillaume Fournier.)

 

C’est tout pour aujourd’hui !

Si cet article vous a plu, n’hésitez pas à me le dire en commentaire et à télécharger le guide GRATUIT pour corriger son roman en 12 étapes accompagné de sa check-list.

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2 Commentaires

  1. Éléonore

    Bonjour David,
    Oui bien sûr, n’hésitez pas à m’envoyer un email. Celui que je vous ai envoyé m’est revenu en échec…

  2. David

    Bonjour Éléonore
    je suis en train d’essayer d’écrire un petit texte de quelques pages pour une histoire qui devrait selon moi s’adresser aux jeunes adultes, entre 13 et 25 ans.

    Est-ce qu’on pourrait en discuter ?
    Aimablement

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